Nombres Premiers SAS


36 divisible par 1 et 2 et 3 et 4 et 6 et 9 et 12 et 18 et 36 (nombre composé)


Je sors pas bien vaillant. Je ne vois plus d’un oeil, je dérape sur l’essence, et je suis tellement amoché dans la tête que j’ai du mal à marcher droit. En plus, je traîne l’âne mort. Je le flanque à l’arrière de ma voiture et je démarre.

J’emboutis le trottoir, je grille des feux, j’ai l’impression que le monde hurle et tourne autour de moi - impossible d’avoir les idées claires. Je racle une voiture tout du long, je m’en branle.

Dès que je reprends un peu le controle de moi, je comprends que je saigne complètement de la moitié du visage, ce qui couvrait la vision de mon oeil droit. Je me dis que j’ai bien fait de fuir, mais je pense tout de suite à un truc : le satellite dont l’angliche m’a parlé.

Je rentre dans un long tunnel et je fais une queue de poisson pour bloquer une voiture au hasard. C’est une pauvre mère de famille qui manque de s’évanouir sur le triste spectacle de mon visage saignant et de mes sapes trempées d’essence. Sans même braquer mon fusil sur elle (je le tiens à la main, c’est suffisant) je lui demande les clefs de sa voiture, et je lui donne les miennes. Elle s’execute en pleurant.

Je repars en direction inverse. Trace-ça, satellite de mes couilles.

Je passe chez moi, j’embarque la fille.

Je sonne chez mon voisin, un gros lard qui beugle quand il y a du foot à la télé. Je lui achète 15 000 € cash sa caisse pourrie fabriquée en Roumanie et je lui promets 5 000 € de plus si des gens viennent poser des questions et qu’il ne répond rien (promesse que je ne comptais pas tenir, bien entendu).

On change de voiture, on part plein ouest, vers l’Océan. Mes pensées me reviennent à mesure que les kilomètres passent sous mes yeux, et je me dis que je l’ai pas trop mal joué.

A onze heures du soir je m’arrête dans une zone industrielle. Je vois une entreprise de bâtiment, avec un parc auto bien doté. C’est week-end demain, autant en profiter. J’ouvre la grille d’un coup de fusil qui fait s’enfuir en couinant le chien de garde.

Je me débrouille pour prendre un pick-up spécialisé dans la plâtrerie. Je charge Matt toujours dans les choux dans la benne.

Il est minuit quand on s’arrête enfin devant un motel lumineux où vont et viennent clients et fournisseurs du sexe tarifé de province.

Je coupe le contact et j’éclate de rire.

Je venais de me rappeler que j’avais enfermé l’angliche dans le “centre de calcul”. En prévision d’une descente de MegaPrimes j’avais tout vidé en bas et installé l’ordinateur le plus vieux et le plus lent que j’avais pu trouver : un Apple II qui pouvait executer le mirobolant chiffre d’un million d’opérations à la seconde.

Et dessus j’avais tapé les mots, écrits dans la belle police de caractères verdâtre de la machine : “VA TE FAIRE FOUTRE”